Le vin de Lissey

 

 

          1880, le 13 février

            LISSEY - Canton de Damvillers. - Les vignerons de cette commune, l'une des plus cruellement éprouvées en ces dernières années par les gelées printanières et par la grêle, se sont concertés sur les mesures à prendre, en présence des dégâts qu'ont occasionnés dans leur vignoble les froids successivement rigoureux de cet hiver. ces froids, comme on le sait ont exercé une pernicieuse influence sur le bois de la vigne, qui est en grande partie perdu, et menacent les viticulteurs d'un désastre bien plus étendu encore que tous ceux qu'ils ont éprouvés jusqu'ici.

            De l'entente des vignerons de Lissey, est résulté l'avis suivant que nous croyons utile de faire connaître à tous les vignerons de la contrée, en ce moment où commence d'ordinaire la taille.

            Dans les vignobles où l'on a l'habitude de laisser des plies, il serait bon de ne pas supprimer cette année les brins qui se trouvent sur le bout de la plie et qui ne doivent pas être gelés, attendu que, lors des grandes rigueurs de décembre, ils étaient sous la neige en raison de leur rapprochement du sol. Ces brins, que l'on sacrifie d'habitude, pourraient cette année deux ou trois raisins.

            On procéderait de la façon suivante quant à la taille: on couperait sur la plie tous les brins gelés et l'on taillerait tous ceux qui auraient été garantis par la neige, même ceux qui se trouvent à l'extrémité de la plie.

            Les personnes qui nous transmettent cette communication, avec prière de la publier, dans l'intérêt de leurs confrères en viticulture, nous informent que d'un accord commun, tout le monde procèdera de cette sorte dans le vignoble de Lissey. (Le journal de Montmédy)..

      

Vigne d'expériences

Archives de la Meuse

 

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(Article paru dans la Dépêche meusienne du 3 novembre 1935)

  

Lissey: les vendanges vers 1900

 

                Avant la guerre, le vin de Lissey jouissait d'une renommée de premier ordre. Quand on parlait de <<vin de pays>> ou de <<vin des côtes>>, le vin de Lissey était parmi les meilleurs et son nom était cité avec les vins fameux.

            Depuis la guerre sa réputation a encore grandi; peut-être même pourrait-on dire qu'elle est unique dans la Meuse.

            M. César, le distingué professeur d'Agriculture, nous certifiait lors d'une visite faite au vignoble, en septembre 1934:

            <<Votre vignoble est unique, c'est le seul que je connaisse dans la Meuse qui ait conservé son ancien cépage. Partout ailleurs le vieux plant a été abandonné et remplacé par des hybrides producteurs directs. Mais votre ancien cépage, votre Pineau-Meunier, est tout simplement merveilleux. Vous pouvez être fier de votre vignoble local>>

            Oui M. César, nous en sommes fiers. Si les autres vignerons ont abandonné le Pineau-Meunier, parce qu'il est trop délicat, pour le remplacer par des hybrides, libre à eux, mais nous, nous préférons la qualité à la quantité; nous conserverons notre ancien plant, car lui seul peut donner le véritable vin de pays, le véritable <<vin de Lissey>>.

            Quelle différence ! Aucune comparaison ne peut être faite. Comment mettre en parallèle notre vin si clair, si net, si pétillant, si léger, si agréable, si fin, si bouqueté avec ces vins épais, riches en alcool peut être, mais souvent âpres et sans bouquet. Ces derniers sont des vins de table de consommation courante, tandis que le <<vin de Lissey>> est un vin de luxe. Oui, un vin de luxe tout comme ses frères ou cousins-germains: le champagne, les vins d'Alsace ou de la Moselle.

            Le vin de Lissey, le fruit de la vigne, le fils du Pineau-Meunier est la gloire de nos vignerons. Certes le cépage est délicat, il demande des soins continuels. Aussi, voyez nos vignerons d'un bout à l'autre de l'année occupés à tailler, piocher, provigner, racler, busir, rebusir, faire la feuille, nettoyer, sulfater...

            Avec quel amour ils la soignent la vigne, avec quels soins, quelle sollicitude ils veillent sur leurs récoltes.

            D'autre part, pour loger ce vin si délicat, quels soins le vigneron apporte-t-il à sa cave, à sa cuve et à ses futailles. Le vrai vigneron est d'une propreté minutieuse, méticuleuse. Les barriques vides sont nettoyées, méchées, rangées au grenier. Aussi la veille de la vendange, lorsqu'il passe la revue, quelle satisfaction il éprouve quant il retrouve les futailles nettes et l'intérieur couvert de cette <<vin pierre>> qui brille comme des diamants. Alors le vin peut venir, il sera bien logé, bien <<franc de goût>>.

            Oui, pour la préparation de son vin, le vigneron de Lissey doit être un artiste en son genre. Savoir préparer sa cuve, vendanger au bon moment, tirer le vin blanc dans des tonneaux spéciaux, toujours les mêmes, faire fermenter le vin gris pendant quelques heures, le surveiller, le goûter, attendre un peu, puis se relever même la nuit pour le tirer au bon moment, voilà où on retrouve le véritable vigneron. En effet, le vin gris pour avoir toute sa valeur, pour avoir son véritable bouquet, le goût de terroir, le <<goût de brousquin>> doit être tiré à la minute précise et seul un véritable vigneron peut réussir ce petit prodige.

            Le vin logé dans les fûts se clarifiera en cave par les gelées d'hiver et à la pleine lune de mars, par un temps bien clair, il sera mis en bouteilles. Bientôt il <<se fera>> quand on le versera, il pétillera dans les verres, moussera un peu, <<crémera>> plutôt comme disent les vignerons, formant un cercle de bulles tout autour du verre.

            Alors quel bon petit vin !

            Au début d'un repas, avec les hors-d'œuvre, avec du saucisson de la Meuse, avec une quiche lorraine, avec un brochet de nos rivières, buvez quelques verres de vin blanc de Lissey. Alors quel régal ! et aussi avec quel appétit vous attaquerez le gros du repas.

            Plus tard, quelque jour de juillet et d'août, si vous vous sentez un peu fatigué, déprimé ou un peu triste, allez voir un vigneron ami. Tout en causant, il débouchera une bouteille de gris et après quelques libations, vous vous sentez léger, dispos, les points noirs s'envolent et une demie gaîté arrive. Une fumée légère et bienfaisante vous monte au cerveau qui transforme et embellit toutes choses. Vous vous sentez plus gaillard, plus confiant en l'avenir. Vous voyez la vie plus belle.

            Ne croyez pas que ce soit de l'ivresse. Non, la gaîté, l'euphorie ne sont pas l'ivresse.

            Et après ?... Eh bien, <<rien à la tête, rien au ventre>>, comme dit un vieil ami , jamais de tête lourde ou douloureuse, non, le vin de Lissey fait du bien, mais jamais de mal.

            Pour terminer, un petit conseil aux vrais amateurs: Venez vous-même choisir votre vin de Lissey. Venez le goûter chez les vignerons, vous serez sûrs d'avoir du vrai vin de Lissey. Et méfiez-vous du vin dont l'origine est incertaine.

 

Recette: Le brochet au Lissey ( vin rosé de la région ).

Tronçonner un brochet moyen de 750 gr. environ en tranches de trois doigts d'épaisseur.

Assaisonner et passer légèrement dans la farine.

Dans une casserole plate, mettre du beurre, une goutte d'huile, quelques dés d'oignons et de carottes, ajouter le brochet et faire revenir rapidement.

Dégraisser, flamber au cognac, ajouter un verre de Lissey ou à défaut de champagne nature ou vin blanc très sec, deux tomates fraîches pelées, un peu de jus de champignons, et faire bouillir vivement 10 minutes.

Retirer le brochet dans un plat creux, garnir de champignons.

D'autre part faire réduire la cuisson de moitié, ajouter de la crème fraîche, une pointe de cayenne et faire réduire à nouveau.

Lier avec un jaune d'œuf et passer sur le brochet.

Garnir le plat de croûtons et servir.

Hôtel Planson à Sivry-sur-Meuse ( Meuse - La France à table n° 115 de juin 1965 ).

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             1513: Les vignerons de Lissey portent dans le clos ducal de Lissey 400 "hottées d'aisnes" (aisne = marc de raisin) et font 400 fosses pour une vigne de sept jours de superficie. On voit à Lissey, un bourgeois de Verdun tenir une vigne d'un jour divisée en quatre parties et ascencée à des vignerons du village; un bourgeois de Saint-Mihiel y posséder un demi-jour de vigne et deux autres "forains" (étrangers, de l'extérieur) ascencer leur tenure à des hommes de Lissey.

            A Lissey, en 1513, époque où la démographie est loin d'être celle de 1330-1340, le duc de Bar perçoit divers cens sur des tenures: 34 parcelles en tout dont 12 sont partagées entre plusieurs tenanciers, 5 l'étant pour raison de succession (plusieurs enfants) ; deux tenures seulement ont une contenance d'un jour, neuf sont d'un quart de jour, 8 sont de deux denrées seulement; à Ecurey, sur 20 tenures, huit sont partagées entre plusieurs tenanciers. Au XIX e siècle, les vignes d'un jour de superficie (34 a) sont rares dans les Côtes, le demi quart de vigne (2a 20) prédomine. (Le droit et la terre. Alain Girardot T II, p. 235-236).

             1889: Octobre: La vendange a commencé dans nos côtes lundi dernier.. L'ensemble de la récolte paraît satisfaisant au point de vue de la quantité et de la qualité. Quelques villages, tels que Lissey et Bréhéville sont très favorisés, tandis que d'autres le sont beaucoup moins.

            Néanmoins, malgré l'abondance de la récolte, les prix paraissent devoir se maintenir élevés. On parle de 100 francs la pièce de 200 litres et des marchés ont déjà été conclus sur ces bases.

            Depuis quelques temps et cette année surtout, une habitude tend à se répandre dans certains pays privés de vigne d'où l'on se rend dans les vignobles avec des chariots chargés de cuves. On y achète des raisins, soit au poids, soit à la rapinée. La vendange se fait ainsi sous les yeux de l'acheteur qui emporte la récolte dont il s'est rendu acquéreur et fait préparer son vin sous ses yeux. De cette façon, il est assuré de la qualité et de la provenance du produit.

            Aussi toute cette semaine on a vu se diriger de nombreux véhicules vers les côtes de Damvillers.(Le Journal de Monmédy)

                    1902: 03 octobre - On nous écrit des Côtes: Le raisin fournira cette année, malgré le peu de chaleur que nous avons eue, un vin qui ne cédera guère en qualité à celui de l'an dernier, pourvu bien entendu que la gelée épargne le vignoble le vignoble pendant encore une quinzaine de jours. Dimanche dernier, j'ai visité le vignoble de Lissey et j'ai été agréablement surpris en voyant la récolte à faire. Le raisin mûrit normalement et a fort bel aspect. Il n'y a pas encore de prix établi, mais je crois que ceux qui achèteront du raisin feront une bonne affaire, car il ne se vendra pas cher et je le répète, le vin pourra encore être très bon cette année, surtout Lissey. (Journal de Montmédy).

             1907: Le vin des côtes de Meuse. - Cette année, le vin des côtes de Meuse, qui est d'une exceptionnelle qualité, car il pèse 10 et 11 degrés suivant les coteaux, est très recherché des amateurs qui savent en apprécier la valeur et la qualité.

            A Lissey, les 3/4 de la récolte sont déjà enlevés aux prix suivants et selon qualité: le blanc, 80 et 85 fr.; le gris, 74 et 80 fr.; le rouge, 70 et 75 fr. la pièce de 220 litres.

            A Ecurey, Réville, Damvillers, Bréhéville et Brandeville, le vin qui n'est pas si doux qu'à Lissey, mais qui a autant de force et de qualité s'enlève facilement aux prix suivants: le rouge, de 60 à 70 fr.; le gris, de 65 à 75 fr.; le blanc, de 70 à 80 fr.

            A Murvaux et Lion-devant-Dun, le vin qui était abondant, se vend aisément 60 fr., le rouge, 65 fr. le gris et 70 fr. le blanc.

          1908, le 5 décembre: LISSEY: - Conférence agricole - On nous écrit: Vendredi 27 novembre, à 7 heures du soir, à la mairie de Lissey, M. Richard, professeur à la Chaire spéciale d'agriculture de l'arrondissement de Montmédy est venu faire une conférence sur la culture de la vigne.

            Pendant 2 heures, le sympathique professeur a parlé en langage explicite et clair, devant une nombreuse et attentive assemblée parmi lesquels plusieurs personnes d'Ecurey et de Bréhéville.

            Devant toutes les maladies dont la vigne est atteinte aujourd'hui, M. Richard a recommandé, pour en tirer quelques avantages, qu'il fallait bien la soigner, et la fumer beaucoup, soit avec du fumier de fermes ou bien avec des engrais.

            Parlant du sulfatage, le conférencier a dit que quand il est venu à Lissey au mois de juillet, pour constater la maladie de la vigne, il avait remarqué que beaucoup de vignerons sulfataient mal.

            Pour arriver à obtenir de bons résultats, il fallait arroser au moins trois fois, prendre le temps nécessaire, pour répandre assez de liquide, afin que toutes les feuilles soient atteintes.

            Il a surtout insisté sur le premier traitement - dit préventif - car souvent c'est de celui-là que dépend la récolte; du reste on ne l'a remarqué que trop bien cette année.

            Comme le phylloxéra a déjà  été constaté sur plusieurs points des vignobles de l'arrondissement et en prévision de la voir se propager davantage, M. Richard a soumis aux vignerons son intention de faire à Lissey une vigne d'expérience, plutôt avec des plans américains greffés. ayant un terrain approprié pour cela, cette pépinière de vigne sera plantée au printemps prochain sur les indications de M. le Professeur, et lui appartenant bien entendu.

            Il a promis à MM. les vignerons que l'année prochaine, il viendrait accompagné d'un spécialiste en la matière donner des leçons de greffage.

            Pendant le cours de la conférence, et après, plusieurs personnes ont posé des questions et demandé des renseignements. C'est avec la plus grande affabilité que le professeur répondit à chacun.

            Nous ne pouvons que remercier M. Richard pour le dévouement qu'il apporte à la cause des vignerons. (Un ami du vin de Lissey) (Le Journal de Montmédy)

          1911: Vins en Meuse: Plutôt abondant, il n'est en général, rouge, gris ou blanc, que passable. Quelques crus cependant jouissent d'une réputation locale nullement surfaite, tels ceux de Buxières, Thillot, Creüe, Hâttonchatel et dans la partie nord de la Woëvre, les vins blancs ou gris de Lissey. (Ernest BEAUGUITTE)

            22 juillet 1911: LISSEY : - La vigne - On nous écrit:

            Nous subissons en ce moment une période de chaleur et aussi de sécheresse, qui nuit beaucoup à la culture, surtout au pâturages; une bonne pluie serait bien nécessaire.

            D'un autre côté, les vignerons ne s'en plaignent pas, car c'est le meilleur temps pour la vigne.

            Parmi les vignobles de Damvillers-Wavrille, jusqu'à Sassey, Mont, Montigny, celui qui est le mieux conservé et entretenu est sans contredit celui de Lissey.

            Les vignerons, par leur courage et leur ténacité, malgré les mauvaises années qui viennent de s'écouler, n'ont pas désespéré. A beaucoup d'entre eux, cette année apportera une belle récolte et les autres une bonne moitié d'année.

            La vigne ayant été bien traitée est de toute beauté et bien verte, aucune trace de maladie.

            Les raisins n'ont pas été trop atteints par la cochylis; ils sont déjà bien gros et bien remplis. Comme disent les bons vignerons on ferait déjà des sapinées.

            Si ce temps reste toujours à peu près favorable, vu l'avance des raisins, la vendange pourrait se faire vers le 20 septembre.

            Dans ces conditions, le vin de l'année 1911, pourrait rivaliser avec celui de ses aînées, les années de 1881, 1893 et 1900.

            L'année 1911 pourra peut-être fêter, comme qualité de vin, le centenaire de sa sœur, l'année 1811, dite de la Comète, qui, au dire des anciens, fut l'année du meilleur vin du siècle dernier.

            Les amateurs, qui ont encore le souvenir de ces bons vins des années antérieures, pourront encore une fois venir faire provision du bon vin de Lissey, un vin pétillant et si agréable dont la réputation n'est plus à faire.        Un vigneron (Le journal de Montmédy).          

            21 octobre 1911: LISSEY - Le vin de 1911 - La vendange à Lissey va se faire vers le 25 septembre.

            Par suite de la grande sécheresse, les vignerons ne feront pas en quantité ce qu'ils espéraient, mais comme qualité le vin sera supérieur à toutes les années antérieures de bon vin.

            Beaucoup de vins gris et blanc sont déjà vendus ou retenus au prix de 75 et 80 fr. l'hectolitre, pris en cave.

            Le raisin est bien noir, pas de pourriture ni moisissure et encadré de belles feuilles vertes; il est d'une beauté enviable. Avis aux amateurs.

            Un ami du bon vin.                                            (Le journal de Montmédy).

          1932: La Dépêche Meusienne du 6 novembre 1932

          La vendange s'est effectuée à Lissey, le 15 octobre. Le vin blanc et le vin gris sont tirés et seront de bonne qualité. Les amateurs d'une bonne bouteille de vin de pays pourront s'approvisionner à Lissey comme les années précédentes.

                   En 1932, la surface cultivée est de 4 hectares

          1935: La Dépêche Meusienne du 27 octobre01935

        La vendange est terminée. La récolte est bonne et abondante. Les amateurs de "vins de Lissey", c'est-à-dire de vrai vin de pays, issu des anciens cépages Pineau-Meunier pourront venir goûter ce bon vin et faire provision. Les vignerons de Lissey mettent les amateurs en garde contre les offres de vin provenant des hybrides producteurs directs. Seuls les anciens plants Pineau-Meunier peuvent donner le vrai vin de pays, le vrai vin de Lissey. Méfiez-vous des contrefaçons. Le vignoble de Lissey, seul, est encore constitué par des anciens plants.

          1935 

          Annonce parue dans le Bulletin Meusien

          Pour ceux qui douteraient de la qualité du vin de Lissey, il est clair que celui-ci cotoyait les meilleurs crûs de l'époque...

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          1938: La dépêche Meusienne du 5 novembre 1938

          Récolte des vendanges pour l'année 1938. Les propriétaires de terrains situés sur le territoire de Lissey ont cultivé 232 ares 85; ont obtenu 12 hl 73 de vin blanc, 154 hl 01 de vin rouge.

 

 

Provigner: pratiquer le provignage ou provignement: Marcottage de la vigne consistant à coucher en terre un cep ou un sarment afin de remplacer une souche manquante.

           1513:Le droit et la terre. Le Verdunois à la fin du moyen-âge. (Alain Girardot)

           Page 217: le Verdunois est alors un pays de polyculture à dominante céréalière. La production essentielle est celle du froment, le pain blanc est à la base de la nourriture, celle que le seigneur dispense à ses corvéables y compris dans les terroirs peu favorables, ex: les vendangeurs du clos comtal de Trougnon reçoivent du pain de froment en 1344; même chose pour les vignerons de Lissey en 1513 et pour les faucheurs, faneurs et vignerons de Sampigny en 1456.

           Page 234: au XVe siècle, le chapitre cathédral a des pressoirs banaux et perçoit un terrage des vins à Bréhéville; il a en 1512, une "foullerie" à Lissey; en 1512-1513, le duc de Bar a des pressoirs à Damvillers, Ecurey et Lissey, un clos à Lissey; il perçoit des terrages de vins à Réville et Etraye, et des cens de vigne à Lissey et Ecurey

          Page 235: en 1513, les vignerons de Lissey portent dans le clos ducal de Lissey 400 "hottées d'aisnes" et font 400 fosses pour une vigne de sept jours de superficie.

          Page 236: on voit à Lissey, un bourgeois de Verdun tenir une vigne d'un jour divisée en quatre parties et ascencée à des vignerons du village; un bourgeois de Saint-Mihiel y posséder un demi jour de vigne et deux autres "forains" ascencer leurs tenures à des hommes de Lissey. A Lissey en 1513, époque où la démographie est loin d'être celle de 1330-1340, le duc de Bar perçoit divers cens sur des tenures: 34 parcelles en tout dont 12 sont partagées entre plusieurs tenanciers, 5 l'étant pour raison de succession (plusieurs enfants); deux tenures seulement ont une contenance d'un jour, neuf sont d'un quart de jour, huit sont de deux denrées seulement; à Ecurey, sur 20 tenures, huit sont partagées entre plusieurs tenanciers. Au XIXe siècle, les vignes d'un jour de superficie (34 a) sont rares dans les côtes; le demi-quart de vigne (2a. 20) prédomine.

 

          1963: Recensement général du vignoble meusien

Pour Lissey: superficie totale: 1 ha 58 a 58 ca, 19 exploitations, 32 parcelles ( 1 ha 19 a 44 ca), dont exploitations livrant du vin à la vente: 14 pour 23 parcelles et exploitations produisant du vin pour la consommation familiale: 5 pour 9 parcelles ( 39 a 14 a).

Encépagement : Meunier, 22a 70; Baco 1, 41a 50; Gaillard divers, 1a 70; Kuhlmann divers, 2a 69; Kuhlmann 188 2, 3a 45; Kuhlmann 319 1, 4a 40; Landot divers, 2a 35; Oberlin 595, 57a 91; Seibel divers, 13a 18; Seibel 5455, 3a 20; Seyve Villard divers, 0a 70; cépages indéterminés, 4a 80.

Années de plantation: avant 1914, 2a 35; de 1920 à 1924, 10a 88; de 1925 à 1929, 18a 89; de 1930 à 1934, 21a 05; de 1935 à 1939, 56a 69; de 1940 a 1944, 10a 23; de 1945 à 1949, 19a 45; de 1950 à 1954, 11a 84; de 1955 à 1958, 6a 20; âge incertain, 1a avant 1931.

 

Quelques étiquettes

 

 

 

Vignes à Lissey en 2011

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La vigne de Rémi

(Article paru dans le "Petit Journal" de Lissey n° 13)

 

            Avant 1914, le village de Lissey comptait 85 hectares de vigne répartis sur les côtes au-dessus du village. A cette époque les vendanges à Lissey voyaient 400 personnes se joindre aux 400 habitants du village pour quinze jours de travail. Le soir les gens dansaient dans les rues et les granges.

            Le phylloxéra, maladie de la vigne a tué tous les plans de cette époque, puis la guerre de 1914 et son cortège de mort du village, ont tué cette vigne qui faisait la richesse et la renommée de Lissey. Philippe Voluer, historien du nord meusien a dit qu’une année la production de Lissey avait sauvé des maisons de champagne touchées par la maladie du raisin. Les habitants du village sont alors partis chercher du travail vers Longuyon, Longwy ou Montmédy ainsi Georges Fallet qui travaillait au chemin de fer à Montmédy.

          Article de l’Est Républicain de 1975                                                         

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            Rémi Richard est le fils de René Richard.

 

            Son père était un agriculteur du village et il possédait quelques ares de vigne : 2,5 ares au Cure, 2,5 ares aux Macières et 5 à la grand vigne soit 10 ares. A l’emplacement actuel de la vigne, Mr Vital BON avait une vigne plantée en cépage Oberlin. Un autre terrain sur la route de Bréheville appartenait à Jean Richard dans lequel son fils Marc Richard âgé de 12 ans aidait à travailler la vigne. Un dernier terrain appartenait à Charles Richard qui faisait ses vendanges lui-même malgré sa cécité en tâtant les grappes de raisin. La grange que Rémi Richard utilise pour presser le raisin lors des vendanges appartenait à Adolphe Saint-Vanne.

            La vigne actuelle date d’après le remembrement du village en 1962. Un terrain sur la vigne actuelle dans lequel de la vigne a été plantée, puis un échange entre Maurice Doyen et Rémi Richard concernant un terrain de 30 ares à la Croix Verte et un terrain jouxtant la vigne récemment plantée a permis de planter du cépage Meunier, Pinot noir et Gamay. On retrouve ces mêmes cépages dans les grands vins de champagne. Il y a trois routes de vignes en Meunier derrière la maison de la sœur de Rémi : Mme Lambert.

 

 

            Le total représente 16 ares qui sont déclarés pour la consommation familiale. Mais Rémi ajoute « j’ai le droit d’en offrir ». Il continue « quand j’allai dans le Pas de Calais voir mon copain de régiment Albert Evrard, Mme Blaise de la Régie des impôts me donnait un acquit avec le motif que comme je fais mon vin je n’aime pas celui du commerce et j’ai donc le droit d’emmener 50 bouteilles pour le mois ». Dans le village du Pas de Calais où j’allais, la fête patronale se déroule en août ; mon vin était bien apprécié chez le copain.

            Rémi me dit : « Chaque producteur doit avoir sa production chez lui, la tante avait un tonneau de sa vigne chez son neveu, un conseiller lui a dit – <<ne me dites pas cela car il devrait être chez vous, je n’ai rien entendu, son vin doit être chez elle ».  

            Revenons à la vigne de Lissey.

            Le travail commence au printemps par la taille de la vigne. 

            Il faut couper les sarments inutiles en laissant deux mariés par pied.

            Les sarments les plus grands qui permettront d’attacher sur le fil de fer avec des joncs, et deux ou trois brochettes taillés à deux yeux (les boutons de la tige) au pied du cep.

            C’est sur une brochette que l’on prend les mariés l’année suivante. Puis on rebrise, c'est-à-dire que l’on coupe tous les brins inutiles qu’on appelle des gourmands.

            Il faut traiter la vigne pour la protéger des maladies, le mildiou est la plus commune, mais il y a aussi le blackrot et l’oïdium. Le traitement se fait avec du sulfate de cuivre, on peut aussi utiliser de la bouillie bordelaise ou du mordox. Le moyen de travail de la traite est le pulvérisateur. Il faut retailler au printemps et en automne quand la sève circule, car le bois est un corps caverneux et les parasites peuvent circuler dedans.

            La vendange se fait toujours fin septembre début octobre en fonction de l’état du raisin qui doit être mur.

            On coupe les grappes avec un sécateur et on les mets dans des bassines qui vont aller ensuite au pressoir.              

 

 
 

            Celui qui sert actuellement à environ 20 ans. Avant on pressait directement au-dessus des tonneaux avec un petit pressoir mais il y avait plus de particules de peau de raisin qui tombaient dans le tonneau et changeaient la couleur du vin. Maintenant on fait une première pressée qui donne un jus blanc et après avoir mouliné ce qui reste de la première pressée, on en fait une seconde qui donne un vin gris (rosé).

            Le vin reste dans le tonneau jusqu’en mars avril, il faut attendre que le vin est fini de travailler. Les maisons de vins mettent du sulfite dedans pour arrêter le travail des moisissures et ainsi gagner des semaines dans la production de leur vin, ce qui leur permet de le vendre plus vite.

            Les tonneaux font environ 250 litres. Ils sont en chêne et ils viennent de Bourgogne, achetés par Rémi Richard à Bruley. Il ne faut jamais remplir complètement un tonneau car le vin fermente. Pour compléter l’évaporation due au travail du vin, on met de l’eau et du sucre.                               Dans le temps on mettait du blanc d’œuf pour éclaircir le vin. A Lissey, la mise en bouteille se fait en mai avec des capsules

            Une fois le vin tiré, on lave le tonneau. Puis on brûle une mèche de soufre attachée dans le tonneau par un fil de fer, cela tue les moisissures pour pouvoir réutiliser le tonneau pour l’année suivante. Ensuite le tonneau reste à la grange mais il faut s’en occuper avant la vendange car le bois sèche et il n’est plus étanche, pour que le bois gonfle, il faut mettre deux ou trois seaux d’eau et remuer le tonneau pour que le bois gonfle.

            Rémi Richard dit « la vigne demande du travail soigné, mon père m’a appris à être rigoureux, je crois que je le suis plus que lui maintenant ».

            Philippe Voluer a écrit un article sur la vigne à Lissey dans l’Est Républicain.

            Une année (2007) l’adjudant Lenhard et Marc Richard ont fait avec l’Office de Tourisme une journée découverte du cimetière allemand de la Bergerie et de sa rotonde, à cette occasion une visite de la vigne de Lissey a été organisée, suivie d’une réception à la salle des fêtes qui a permis à tous de découvrir le vin de Lissey.

Vignes lissey 2007

 

            En 2010 l’association APTM de Montmédy est venue faire un reportage sur la vendange à Lissey. A cette occasion Christian Klein avait interviewé Rémi Richard. Ce film a été ensuite projeté à la salle des fêtes et des DVD ont été vendus.

                                                                                  La vigne de Rémi par Christian Desroque

          2017, le 19-09

Vendanges 2017 img

 
 
 
Commentaires (2)

1. Schneider (site web) 14/01/2013

Bonjour
Avez-vous conservé ce "meunier" de 1935 et avant ? avez-vous d'autres anciens cépages, savez-vous s'il existe un conservatoire de cépages en Meuse ?

2. Pierret Jean Paul 25/04/2015

Mes ancêtres (Déseaux) côté maternelle sont tous originaires de Lissey depuis 1495 Ils étaient pour la grande majorité vigneron aussi r votre article m'a éclairé sur ce pouvait être leur vie à cette époque mais également sur la renommée qu'avait le vin de LISSEY

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