Jean MERMOZ à ECUREY
(09/12/1901 - 07/12/1936)
Qui connait encore Mermoz aujourd'hui ? Les anciens peut-être! Je me souviens que dans ma jeunesse, après la guerre, on en faisait grand cas. C'était un héros
Il y aura quatre-vingt ans, à la fin de 2016, le 7 décembre exactement, qu'en pleine gloire, Jean MERMOZ, ce super pilote de la compagnie Air-France disparaissait en mer avec l'équipage de la "Croix du sud", alors qu'il accomplissait sa 24ème traversée de l'Atlantique-sud. Pendant plusieurs jours, la France entière vivait dans l'attente certaine que la Croix du sud ne s'était qu'égarée. On dût se rendre à l'évidence: tout avait été tenté pour retrouver l'équipage. Mais rien n'avait abouti. .
Mais savez-vous que celui-ci avait des attaches à Ecurey-en-Verdunois et qu'il s'est rendu plusieurs fois dans ce village ?
Je vais vous raconter cela au travers d'un article que j'ai trouvé dans le "Bulletin Meusien" et en y ajoutant quelques renseignements complémentaires empruntés au "Petit Jules", ancien journal du collège de Damvillers et" sur le site internet de Mr et Mme Lambotte-Coupard d'Ecurey ("Ecurey-en-Verdunois du haut du clocher") qui ont fait des recherches plus poussées sur le passage de Jean Mermoz à Ecurey. C'est d'ailleurs à leur initiative qu'une plaque commémorant le 50ème anniversaire de sa mort a été posée dans le cimetière d'Ecurey.
Article du Bulletin Meusien
La borne kilométrique que nous venons de dépasser annonce Saint-Maurice-sous-les-Côtes: 0 km. 800.
Notre voiture va bien, roule et saute dans un brouillard léger, mais lourd de pluie.
Et voici un village, des maisons....
Nous arrêtons notre Hotchkiss devant une maison qu'on nous a indiquée comme étant le presbytère.
- M. le curé doit être chez lui, nous répond une brave femme que nous interrogeons avant d'entrer.
Et trois minutes plus tard, nous sommes devant un prêtre que nous ne connaissions pas, ni ma compagne, ni moi,. Il est grand, paraît fort et nous accueille avec aisance.
- Mesdames, dit-il, veuillez entrer. Il nous avance des sièges. Je nomme ma compagne, une amie qui a bien voulu m'accompagner. Je me nomme moi-même et je viens au nom du "Bulletin Meusien", demander à M. le curé Willaume, de Saint-Maurice, quelques renseignements de famille sur son parent: le glorieux Mermoz, mort au champ d'honneur de l'Aviation.
- Ah Mermoz ! me répond mon interlocuteur, le grand Mermoz dont je n'étais que le cousin au troisième degré et dont je voudrais pouvoir me dire le frère !
Et M. le curé de reprendre:
- Et d'abord, Mesdames, êtes-vous bien ? Voulez-vous un meilleur feu ? Je ne m'attendais pas ....
- Non, non, Monsieur le curé. Merci. Nous sommes bien couvertes et nous n'avons pas froid.
- Ainsi, ce sont les dames qui sont reporters aujourd'hui, nous dit M. le curé, en souriant.
- C'est une idée du directeur du "Bulletin Meusien". Il prétend que les dames effraient moins les gens qui vont être soumis à la torture de l'interview, et que nous réussissons aussi bien que les messieurs, sinon mieux.
- Je le crois, comme lui, Madame... Et pour qu'il ne soit pas désabusé, je vais vous dire tout ce que je sais sur Mermoz.
Il fait un geste pour rassembler ses idées et poursuit:
- Malheureusement, ce que je sais sur mon glorieux et regretté petit cousin se résume à peu de choses... D'abord, un peu de généalogie si vous voulez : M. Jules GILET, marchand de bois, et sa femme qui était sage-femme, eurent un fils. Ce fils épousa Mlle Rosalie WILLAUME, qui habitait Ecurey (qui ne s'appelait pas encore Ecurey-en-Verdunois et qui fut autorisé à porter ce nom à compter du 20 juin 1938, par décret du 3 novembre 1938, paru au BO du ministre de l'Intérieur) et qui fut la grand-mère de Mermoz. Après le mariage, les époux GILET-WILLAUME vinrent habiter Rethel, dans les Ardennes, dont M. GILET devint le juge de paix. De cette union enfin naquit une fille, laquelle épousa un M. MERMOZ et c'est de ce nouveau foyer qu'est sorti Jean Mermoz, ce héros dont la France s'enorgueillissaihier et qu'elle pleure aujourd'hui...
Et M. le curé WILLAUME s'arrête un instant.
- Avez-vous pu, Mesdames, suivre sans trop de difficultés cet arbre généalogique qui est un peu le mien aussi ?
- Parfaitement, Monsieur le Curé.... Du moins je le crois et je pense arriver à le faire revivre dans mon journal tel que vous me l'avez décrit.... Vous en jugerez vous-même, car vous me permettrez de vous en adresser un numéro !
- Dites que j'y compte absolument, Madame, que vous me ferez un très sensible plaisir et que je serais même fâché de ne pas le recevoir.
Nous nous sentons en confiance et nous sourions tous ensemble.
Et je reprends:
- N'avez-vous pas maintenant, Monsieur le Curé, quelques anecdotes, quelques détails pour égayer un peu notre paysage... où il n'y a encore qu''un arbre !
- Parfaitement... J'y pensais bien, Madame... La généalogie, c'est une science toujours un peu aride. Il y faut mêler quelques fleurs du chemin pour faire passer le tout... Mais là encore, je ne suis pas très riche... Ecoutez: Jean Mermoz n'a donc pas vécu dans la Meuse. Il y est venu pour la première fois en 1936 ( donc peu avant sa mort survenue le 7 décembre 1936) à Ecurey et c'était le jour de la fête patronale du village. D'abord il est allé au cimetière. Toujours nos héros ont le cœur pieux. Il a cherché la tombe de ses grands parents. L'ayant trouvée, il s'est recueilli comme il devait... Puis il est parti chercher, dans la fête. Sa grand-mère lui avait dit: << Puisque tu vas là-bas, tu me rapporteras de la bonne brioche comme on savait la faire ce jour-là dans nos villages, et quand j'étais jeune...>>. Et l'histoire raconte hélas qu'il n'en trouva point !... Le secret s'en est perdu, sans doute, avec la guerre et le reste...
- Je suis contente, ravie et je le fais savoir à M. le Curé qui poursuit:
- Mais Mermoz ne se donna pas pour battu... L'histoire ne nous dit-elle pas qu'il était tenace comme pas un !...
Il entra dans toutes les boulangeries. Il voulait de la brioche... C'était pour sa grand-mère. Il l'avait promis... Je m'imagine que quand il était au-dessus de l'Océan, dans son << zinc >>, comme on dit, il devait pareillement se souvenir des promesses qu'il avait faites de parvenir et de vaincre !... Un jour pourtant !...
Et M. le Curé Willaume n'acheva pas sa phrase.
- Et puis Mermoz ne pensa plus à la brioche... Devant l'inutilité de ses efforts, il céda, car il était sage aussi. Il bavarda gentiment avec les gens du village, avec notamment M. Collignon, entrepreneur à Sivry-sur-Meuse. Puis il partit pour revenir le dimanche suivant, en voiture et avec toute une bande joyeuse d'amis... Vous ne trouvez pas un peu singulier ce départ suivi de ce brusque retour ?... Quand j'y pense, je me demande si ce n'est pas l'attirance meusienne qui avait parlé en lui, lui rappelant qu'Ecurey était un charmant village... Enfin, il quitta la Meuse pour tout de bon et il n'y fut plus revu !
Nous écoutions maintenant, mon amie et moi, avec respect, avec une pointe d'émotion.
- Voilà, Mesdames, repris M. le curé Willaume, tout ce que je puis vous dire... Pourtant, je ne veux pas vous laisser partir sur une note trop attristante. Voici autre chose, qui n'est pas particulière à Mermoz, mais qui peut pourtant conduire à cette déduction que, dans la famille, on a le culte des brioches et des gâteaux.... Une des tantes de Mermoz avait épousé un M. Lemaire. Cette tante était sage-femme à Paris... Elle fut appelée souvent à la Cour Impériale de Russie pour y donner ses soins qui étaient très recherchés. Cela lui valut une fortune. Or très souvent, ces Lemaire-Gilet venaient en vacances à Ecurey. Alors, on se réunissait tous les enfants du village et c'étaient de véritables bombances de brioches et de gâteaux, autour de tables pantagruellement garnies !...
Et comme conclusion, M. le curé Willaume s'en alla prendre un numéro du "Flambeau", édité à la gloire de Mermoz.
- Tenez, Madame, me dit-il.... Je n'ai pas la prétention de vous apprendre quoi que ce soit de la vie aventureuse audacieuse et splendide de mon petit-cousin Mermoz. Mais voici un imprimé qui parle magnifiquement de lui. Il pourra vous servir lorsque vous chercherez à grouper autour de sa belle image les quelques fleurs meusiennes que vous êtes venues chercher près de moi. Il faut une armature, n'est-ce pas, pour soutenir des fragilités. L'armature, vous la trouverez là, dans ces pages ! Les fragilités ce sont les broutilles que je viens d'égrener, avec respect, devant vous... J'ajoute que moi-même, son petit cousin, curé de Saint-Maurice-sous-les-Côtes depuis six ans et anciennement de Robert-Espagne, je me réclame aussi d'Ecurey et qu'enfin je chéris la mémoire de Mermoz... Vous me direz, mesdames, que les liens de parenté doivent toujours faire de la bonne amitié... Mais l'admiration, n'est-ce pas, il faut la garder pour les grands Français !...
Et M. le curé WILLAUME s'inclina devant nous.
En venant à Saint-Maurice-sous-les-Côtes, j'avais ambitionné de trouver sur Mermoz quelques souvenirs inédits et de famille. Mais mon rêve était dépassé. J'avis aussi rencontré un bel éloge de notre héros national.
Deux "petites mains"
Sa vie
Né à Aubenton dans l’Aisne le 9 décembre 1901, décédé dans l’Atlantique Sud le 7 décembre 1936. Pilote français, figure légendaire de l’aéropostale, surnommé l’Archange.
En avril 1920, il signe un engagement dans l'armée pour quatre ans ; il choisit l'aviation sur les conseils de Max Delty, un chanteur d'opérettes. Cependant, il doit revenir en France au 1er régiment de Chasse à Thionville. Son dégoût pour la chose militaire se renforce. Il est démobilisé en mars 1924.
C'est alors que Mermoz connaît l'une des périodes les plus noires de son existence. Ne trouvant pas d'emploi auprès des compagnies aériennes, il connaît la misère et doit vivre de petits boulots. Enfin, il reçoit le 28 septembre 1924 une proposition de contrat dans la compagnie les Lignes aériennes Latécoère dirigée par Didier Daurat.
Mermoz commence comme mécano. Mais il est rapidement affecté en qualité de pilote sur la ligne Toulouse-Barcelone, sur Breguet XIV. La ligne franchissant les Pyrénées est un défi pour les avions de l'époque.
Mermoz est fait commandeur de la Légion d'Honneur le 4 août 1934.
Les pilotes d'Air France ont longtemps porté la cravate noire (mais depuis peu peuvent opter pour du bleu marine), pour rappeler le deuil de Mermoz.
Quand on évoque Mermoz, on pense à ses prouesses, à son audace, à son caractère, à son surnom l’archange… et à sa disparition en plein océan.
Par contre peu de personnes connaissent ses origines meusiennes.
En 1986 le Conseil général de la Meuse a apposé une plaque au cimetière d’Ecurey en Verdunois pour commémorer le 50ème anniversaire de la mort de l’aviateur. En effet ce cimetière abrite la tombe de ses arrière-grands-parents Christophe Gillet et Louise-Madeleine Charpentier qui habitaient près de l’église. Ils eurent plusieurs enfants dont Jean-Baptiste Gillet grand-père de Mermoz.
La fille ainée de celui-ci Georgette-Gabrielle Gillet épousa Charles Mermoz maitre d’hôtel à Aubenton (Aisne). C’est ainsi que naquit Jean Mermoz le 9 décembre 1901.
Hélas le ménage ne s’entendit pas et le petit Jean âgé de 18 mois fut emmené par sa mère chez son grand-père Gillet qui habitait Mainbressy (Ardennes) où il s’était remarié après un veuvage précoce.
C’est là que Jean Mermoz grandit. La vie ne fut pas toujours facile pour la mère et son fils. C’est pourquoi il y eut toujours un grand attachement entre eux deux comme en témoigne la correspondance abondante citée dans le livre de Bernard MARCK : "Il était une fois Mermoz".
Joseph KESSEL, qui connaissait bien Mermoz, dira dans la biographie de Mermoz qu’il publiera aux éditions Gallimard, « … Mermoz n’aimait au monde que sa mère. ».
Maman Gaby ou « Mangaby », comme disait Jean, vint souvent rendre visite à ses parents et amis d’Ecurey et notamment à sa tante, Mme LEMAIRE qui avait été sage-femme à la Cour de Russie.
Jean qui l’accompagnait, connaissait bien Ecurey.
Au moment de la fête patronale, le dimanche après l’Assomption, madame Mermoz et son fils venaient se recueillir sur la tombe familiale. C’était l’occasion pour eux de garder des contacts avec les habitants du village.
Avec son "Amilcar" rouge décapotable qu’il conduisait « pied au plancher », Mermoz faisait l’admiration des enfants de l’école. Au café du village, il offrait toujours une tournée générale.
Mermoz disparut le lundi 7 décembre 1936 à 10h 47 à bord du quadrimoteur Laté 300 « La Croix du Sud » après un dernier message resté célèbre « coupons moteur arrière droit…… ».
A cette occasion, l’instituteur fit faire une rédaction aux « grands » de l’école sur le sujet : « le héros que notre village a connu ».
Madame Mermoz a séjourné une huitaine de jours chez M. et Mme ANDRE-MENGIN dont elle avait fait la connaissance à Dakar.
Lors de son dernier séjour à Ecurey en 1952, elle déclara, pendant une promenade sur la route d’Haraumont, « J’ai fait le tour du monde et pourtant je n’ai rien vu d’aussi beau que la Meuse, mon pays. »
Ecurey a eu également l’honneur de compter, parmi ses habitants, Mademoiselle Paule Dupuy qui était une petite cousine du héros de l’Aéropostale.